dimanche 6 septembre 2015

4e Carnet - 16 mars 1919

16 mars. – Dans l’atelier de Caro-Delvaille.

Est situé 15, North Washington Square où s’élève un arc de triomphe modeste (1). Dans ce square, on se croirait un peu à Londres, avec ces maisons de briques à deux étages et si régulières et toutes jumelles. Ce square, placé à mi-chemin entre le bas de la ville (2), cette fourmilière gigantesque des affaires, et le quartier des résidences que sillonnent des milliers d’automobiles, semble comme par magie appartenir à une autre ville, à une autre ville vraiment située à des centaines de lieues, où le chemin de fer et les autos même ne passeraient pas et où les habitants privés de tous les moyens modernes de locomotion auraient gardé la gravité de nos ancêtres, sans rien pourtant de l’austérité travaillée de nos cités provinciales.

North Washington Square dans les années 1920' d'après une carte postale

Washington Square et ses approches furent, jusque vers la fin du siècle dernier, l’enclos, très clos, dans lequel s’emprisonnèrent les familles jalouses de leur ancienneté et qui bâtirent cette aristocratie américaine plus fermée que la cour du plus petit et du plus orgueilleux des roitelets.

North Washington square en 1920, photo

Mais le luxe des nouveaux riches qui se construisent, plus haut, dans la ville, leurs demeures, et le besoin de confort, les chassèrent de leur berceau ; aujourd’hui les artistes, les seuls vraiment sages de cette ville, sont venus se réfugier loin du bruit et de la multitude dans ces maisons délaissées et délabrées.


J’apprends au peintre que le journal Art in America, qui veut reproduire mon David Jeanne de Ricbemont, m’a demandé qui pourrait l’accompagner d’un article et que j’ai répondu : « Seulement Caro-Delvaille. » Il accepte et dit alors : « Les Américains ne comprennent pas le génie français qui élimine l’inutile et clarifie l’utile ; ils ne comprennent pas Watteau, ils n’y voient qu’un décor, quand Watteau n’a peint que des paysages méditatifs et tristes. Je dirai même qu’entre Greuze et David il n’y a qu’une différence de temps mais pas de science. »

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Note de l'auteure du blog

(1) L'arc dédié à George Washington, véritable symbole du parc a été érigé en 1895, édifié sur son côté nord à partir des dessins de Stanford White pour célébrer le centième anniversaire de l'accession de George Washington à la présidence des États-Unis. À l'origine, il était fait de bois et de papier mâché. Les travaux pour le reconstruire en béton et en marbre se sont étalés de 1890 à 1895. Des sculptures supplémentaires y ont été ajoutées en 1916 et 1918. Aujourd'hui, les étudiants de l'université de New York défilent sous le monument, lors de la cérémonie de remise des diplômes. L'arche a été l'objet d'une rénovation entre 2002 et 2004, pour un budget de 2,7 millions de dollars.
Source Wikipedia

(2) Washington Square, long de 300 mètres, large de 150 et d'une superficie de 4 hectares, est un des lieux les plus populaires du sud de Manhattan où les gens aiment flâner et s'y rencontrer. Le parc a en fait peu de verdure, à part des arbres et des parterres de fleurs, il est presque entièrement pavé et est équipé de tables de jeu d'échecs, installées à demeure, où l'on peut voir les joueurs s'affronter devant un large public.
Cependant, il possède également quelques statues et monuments :
Une fontaine en son centre entourée de bassins.
L'arc dédié à George Washington
Une statue de Giuseppe Garibaldi, au sud-est de la fontaine, fut réalisée par Giovanni Turini (it) et offerte par les Italiens de New York en 1888.
Washington Square est le point de départ de la légendaire Cinquième Avenue que se dirige vers le nord.
Source Wikipedia

(3) Rappel :
La peinture a été vendue par Gimpel à Berwind pour un David et elle est présentée pour telle dans la presse lors d'une visite d'anciens combattants au musée. Source Le Journal d'un collectionneur 

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Extrait de Journal d'un collectionneur de René Gimpel - Edition Calmann-Lévy 1963

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